mercredi 17 janvier 2018

" LA JUSTE ROUTE " : COMMENT LES SURVIVANTS DE LA SHOAH SONT RENTRÉS CHEZ EUX...B.A.


Ce bouleversant film hongrois raconte le retour, en 1945, de deux juifs rescapés dans leur village. A voir absolument.

Août 1945. Une petite gare de la campagne hongroise, où patrouillent des soldats soviétiques. D'un train qu'on dirait de marchandises, dont le bruit de ferraille concassée évoque les pires cauchemars, descendent deux juifs orthodoxes, vêtus de noir.

Le père porte un chapeau et son fils, une casquette. En guise de bagages, deux grosses malles qu'un paysan magyar hisse sur son tombereau. A pas lents, l'attelage part pour le village.

Derrière, le père et son fils marchent en silence, la tête haute. Une longue procession funéraire au milieu des champs d'après-guerre qu'on moissonne sous un soleil brûlant. Pendant ce temps, c'est la panique au village, où l'avantageux maire s'apprête à marier son fils.

Portée à vélo par le chef de gare, la rumeur annonce en effet qu'«ils» sont revenus. «Ils», ce sont les survivants de la Shoah que les habitants, à commencer par le maire, ont spoliés de leurs biens et dont ils occupent sans scrupules ni remords les maisons.

Au-delà de la vengeance

S'«ils» sont là, c'est évidemment pour reprendre ce qu'on leur a volé et qu'on ne compte pas leur restituer. La petite population se barricade, s'invente de faux actes de propriété et, transformant sa culpabilité en morgue, se prépare à bouter les revenants, ces fantômes.

Mais, stupéfaction, les deux juifs traversent le village sans s'arrêter. Ils ne réclament rien. Ils sont bien au-delà de la vengeance, de la revendication, de la haine et même du mépris. Ils vont au cimetière. «Qui enterrez-vous?» , leur demande le maire suspicieux. «Ce qu'il reste de nos morts», répond le vieil homme au regard clair et à la barbe blanche.

Ce film en noir et blanc, dont la lumière d'ordalie rappelle l'admirable «Ida» de Pawlikowski, s'appelle «la Juste Route». Il est signé d'un Hongrois de 46 ans, Ferenc Török, et inspiré d'une nouvelle de Gabor T. Szanto.

On en sort bouleversé, et même commotionné. Cela tient à la beauté cruelle de l'image, à l'impressionnante interprétation des deux rescapés que fige la douleur, et à la représentation moderne d'une tragédie antique, où les vivants rampent tandis que les survivants s'élèvent. Voyez ce film, et faites passer, s'il vous plaît.

En août 1945, au cœur de la Hongrie, un village s’apprête à célébrer le mariage du fils du notaire tandis que deux juifs orthodoxes arrivent, chargés de lourdes caisses. Un bruit circule qu’ils sont les héritiers de déportés et que d’autres, plus nombreux peuvent revenir réclamer leurs biens. Leur arrivée questionne la responsabilité de certains et bouleverse le destin des jeunes mariés.

Jérôme Garcin
La Juste route, par Ferenc Török
Drame hongrois avec Péter Rudolf, Bencé Tasnadi

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