samedi 25 août 2012

Proche-Orient : Régionalisation du conflit syrien : le Liban au bord de l’implosion ?



Kidnappings, confrontations entre les confessions sunnites et alaouites à Tripoli… La situation au nord du Liban paraît de plus en plus instable. Trois analyses pour mieux comprendre !
Interview de François Costantini par  Charles Rassaert pour Atlantico
François Costantini est Docteur en Science politique (Université Paris I Panthéon-Sorbonne) et Diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris. Il est professeur associé à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth et membre du Centre de Politique Étrangère de la Sorbonne.
Les kidnappings se sont accentués ces derniers jours à la frontière syro-libanaise. Comment peut-on expliquer cette situation ?
Vraisemblablement, il s’agirait de réfugiés syriens kidnappés au Liban. Ils existent des services secrets au Liban, des groupes pro-syriens qui sont prêts à servir de bras armés au régime syrien dans le pays.
On peut donc supposer qu’il existe des groupes liés au régime syrien qui pratiquent des enlèvements comme il y a des groupes notoirement hostiles au régime syrien qui s’en prennent aux Alaouites. Il y a donc des vengeances réciproques qui s’exercent au Liban. Cela n’est pas étonnant quand on connait les liens historiques qui existent entre les deux pays.
Ces kidnappings ne sont-ils pas favorable au clan Assad ?
Certainement, l’objectif du régime syrien est de détourner l’attention. Toutefois, le régime syrien n’a pas utilisé le Liban comme bombe à fragmentation. On aurait pu penser que le régime allait pousser le Hezbollah à agir. Hormis la question de Tripoli qui existe depuis 30 ans, le Liban n’a pas été la caisse de résonance du conflit inter-syrien d’aujourd’hui.
Justement, vous faites allusion à Tripoli, cette ville a connu des affrontements entre les quartiers sunnites et alaouites de la ville. Vous confirmez donc que ce cas n’est pas nouveau ?
Ah non, en 1985 il avait une guerre entre « le mouvement de l’unification islamique » un groupe d’islamiques sunnites et de l’autre côté l’armée syrienne et les milices alaouites. Le PSNS, Parti pro syrien laïque qui existait au Liban s’était battu pour le contrôle de Tripoli (première ville sunnite du pays). L’influence syrienne a toujours eu du mal à s’établir dans cette ville. La ville de Tripoli est un point de situation très particulier, ce n’est pas nouveau, il vient d’être ravivé à la faveur du conflit interne syrien.
Le Liban a souvent été présenté comme une caisse de résonance de ce qui se passe au Proche Orient. Est-ce que le pays peut connaître une nouvelle guerre comme il a connu pendant 15 ans ?
Je ne pense pas que le pays va connaître une nouvelle guerre. Nous n’avons pas aujourd’hui les prémices et les ingrédients d’une guerre civile. J’entends par là, deux camps antagonistes armés de la même façon.
Aujourd’hui au Liban, il y a deux entités armées :
le Hezbollah,
l’armée libanaise dont on sait qu’elle a une marge de manœuvre extrêmement réduite par rapport au Hezbollah. Cette armée a été façonnée par le voisin syrien.
Il ne peut pas avoir la même position qu’en 1975. A l’époque on avait d’un côté des Palestiniens surarmés et ensuite des milices chrétiennes qui se sont armées. Actuellement, il n’y a pas deux camps, seul le Hezbollah est armé.
L’armée libanaise a un rôle de neutralité « finlandisé » à l’égard du Hezbollah.
Les bombardements continuent dans les villes syriennes et le régime a de plus en plus de mal à contrôler son territoire. L’Iran et le Hezbollah ne se sont-ils pas déjà préparés à la chute du régime de Bachar el-Assad ?
Oui c’est très vraisemblable, l’Iran a déjà intégré la chute du régime de Bachar et va en contrepartie accroître sa pression sur le Liban. L’Iran va tout faire pour que le Hezbollah contrôle davantage le Liban, le grand frère-syrien ne sera plus là.
Le régime iranien est conscient de la fragilité communautaire du régime syrien. Les puissances sunnites de la région que sont la Turquie et l’Arabie Saoudite veulent remettre la main sur le pays. L’Iran sait qu’il ne pourra pas tenir la Syrie, le conflit a pris une tournure confessionnelle qui, sous le poids des influences régionales, tournera en la défaveur des alaouites.
Le Vice Premier ministre syrien Qadri Jamil a annoncé ce mardi en Russie que la Syrie serait prête à discuter du départ de Bachar el-Assad. La Russie ne cherche-t-elle pas finalement à trouver une solution à la crise syrienne ?  
C’est tout à fait possible. Vladimir Poutine peut convaincre Bachar el-Assad d’arrêter le conflit. La Russie souhaite être partie prenante de la crise syrienne. Cette sortie de crise se fera avec l’implication de puissances régionales comme la Turquie mais aussi l’Iran comme le voulait Kofi Annan.
Néanmoins, je pense qu’il faut encore attendre. La réalité sur le terrain est toute autre et les bombardements continuent. Attendons d’abord un cessez le feu…
Le Président américain Barack Obama a annoncé ce mardi que l’utilisation d’armes chimiques par le régime Syrien pourrait entrainer une intervention américaine. Qu’en pensez-vous ?
Il n’est pas dit que la Syrie n’ait pas d’armes chimiques. Il est peu probable qu’on voit l’utilisation de ces armes. En effet, l’utilisation d’armes chimiques se retournerait contre le régime et aurait une efficacité extrêmement limitée.
En ce qui concerne Barack Obama, je pense que les États Unis veulent récupérer la main sur le dossier syrien. Les Américains veulent être ceux qui définissent le cadre des interdits stratégiques.
Je ne pense pas que les Américains vont intervenir, la position russe est trop importante sur le dossier syrien. Une intervention serait perçue comme une provocation à l’égard de la Russie. Barack Obama a bâti la géopolitique américaine en faisant en sorte que la Russie ne soit plus un ennemi géostratégique. Voilà pourquoi je ne vois pas Obama intervenir en Syrie aujourd’hui.
source : atlantico

Guerre civile : après Damas, Beyrouth ?
Le Liban déjà contaminé par les événements de Syrie
Par Daoud Boughezala est rédacteur en chef adjoint de Causeur.
Depuis dix-huit mois, les spéculations vont bon train sur l’ampleur de la vague révolutionnaire qui déferle sur le monde arabe.
Face au chaos syrien, une question tenaille les esprits les mieux intentionnés : comment intervenir ? Alors que la diplomatie française n’ose pas formuler clairement son credo raisonnable – en substance, il est urgent d’attendre- d’inopportuns boutefeux voudraient nous faire croire que la paix civile se conquiert par la force des F-16 et AK-47.
C’est faire peu de cas des tumultes de la situation régionale. Sans naïveté ni trompettes, un groupe d’opposants syrien a entamé une démarche tout autre en lançant un « appel à la paix » parrainé par la Communauté de Sant’Egidio, une ONG catholique engagée au Moyen-Orient et en Afrique. Parmi les signataires du texte, on trouve Michel Kilo et Fayez Sara, deux anciens prisonniers politiques du régime baathiste qui n’ont rien à envier à la détermination des insurgés. Ce document lucide et courageux stipule : « Tout en reconnaissant le droit des citoyens à la légitime défense, nous réaffirmons que les armes ne sont pas la solution. Il faut refuser la violence et le glissement vers la guerre civile, car elles mettent en danger l’État, l’identité et la souveraineté nationale » et appelle « à soutenir toutes les formes de lutte politique pacifique et de résistance civile, et de favoriser une nouvelle phase de rencontres et de conférences à l’intérieur du pays. »
Vœu pieux, rétorqueront certains. Il est vrai qu’on imagine mal une Perestroïka locale faire vaciller les institutions syriennes. Dans des structures de pouvoir soviétique à base tribale, un scénario brutal semblable à la chute de Ceausescu est hélas le plus probable, sans parler de l’épuration religieuse qui risque de suivre l’avènement d’une Syrie « démocratique ».
Si ce paradoxe peinera les amoureux transis du romantisme révolutionnaire à keffieh, les observateurs du Levant en déplorent les premières étincelles en Syrie, mais aussi au Liban. Dès le début de l’insurrection syrienne, le pays du Cèdre a payé un lourd tribut à Damas, où les deux forces en présence l’acculent à prendre parti. Jusqu’à ces dernières semaines, le président Michel Sleimane maintenait une neutralité à toute épreuve tandis que son gouvernement, dominé par les prosyriens et dirigé par l’ami personnel de Bachar Al-Assad Najib Mikati, s’escrimait à ménager Damas, notamment en refusant de protester contre les si fréquentes violations de la souveraineté libanaise par l’armée loyaliste syrienne.
Mais cet été, la realpolitik syro-libanaise a repris ses droits. Le président, le premier ministre comme le patriarche maronite avaient beau essayer de s’extirper du dossier syrien, ce dernier leur est revenu en pleine figure à la faveur d’une série d’affaires sécuritaires potentiellement explosives pour la si fragile concorde libanaise. Depuis la fin de la guerre civile et les accords de Taëf (1990), l’équilibre politico-confessionnel libanais ne tient qu’à un fil. C’est cette carte maîtresse que les belligérants de la guerre civile syrienne ont copieusement joué, au risque d’entraîner Beyrouth dans l’abîme.
Reprenons le fil des événements. Le 22 mai, onze pèlerins chiites libanaisétaient enlevés à Alep par un groupe d’opposition sommant le secrétaire général du Hezbollah de se désolidariser du clan Assad. Peine perdue, ce rapt entraîna une spirale de règlements de compte (kidnappings, assassinats) interconfessionnels, un peu comme si le conflit syrien se jouait par procuration à Beyrouth et Tripoli, au grand dam des défenseurs de la nation libanaise une et indivisible. Point d’orgue de la discorde, le 9 août au petit matin : l’arrestation spectaculaire de l’ancien ministre Michel Samaha, ancien phalangiste réputé très proche d’Assad, accusé de complot contre la sécurité nationale.
Des preuves irréfutables établiraient sa responsabilité dans la préparation d’attentats que les services syriens auraient programmé en plein Ramadan, afin d’attiser la tension entre sunnites, alaouites et chrétiens pour embraser toute la région. Mais contrairement au temps béni d’Hafez al-Assad, dont le génie stratégique lui permettait de mener simultanément plusieurs politiques chez son voisin libanais (soutien aux phalangistes au début de la guerre civile, puis retournement en faveur des « islamo-progressistes ») pour mieux régner, il semblerait que les pro-Assad se soient pris les pieds dans le tapis.
Des explosifs et des enregistrements de conversations téléphoniques pour le moins compromettantes figurent dans le dossier d’accusation de Samaha, qui serait passé aux aveux. Et les pressions de la présidence syrienne relayée par les partis chiites Hezbollah et Amal pour le libérer aggravent un peu plus les présomptions qui pèsent sur cet affidé de Damas.
Cette histoire de pieds nickelés est si grave que le président Michel Sleimane n’a pas pris la peine d’adresser un message protocolaire à son homologue syrien à l’occasion de l’Aïd-el-Fitr, une première entre les deux pays…
Samaha mis hors-jeu, la flamme partie de Syrie n’est pas consumée au Liban, tant s’en faut. Depuis une semaine, le clan chiite des Moqdad assume le rapt d’une vingtaine de syriens anti-baathistes en représailles à l’enlèvement d’un membre de leur famille. L’opposition libanaise antisyrienne accusant ouvertement le Hezbollah de collusion avec cette politique de la terre brûlée, ce fait divers prend la dimension d’une affaire d’Etat, d’autant que la Turquie et les pays du Golfe s’en mêlent.
L’entrée dans la danse des parrains de l’insurrection syrienne achève d’internationaliser les problèmes sécuritaires du Liban et rebat les cartes. Déjà, le patriarche maronite Raï a dû mettre de l’eau dans son vin de messe prosyrien, à la suite de l’affaire Samaha. Quant aux pétronomonarchies, elles ont recommandé à leurs ressortissants d’éviter de séjourner dans l’ancienne Suisse du Proche-Orient, ce qui n’arrangera pas la situation touristique catastrophique du pays. Même au plus fort de la guerre civile et des bombardements israéliens de 2006, les chiffres du tourisme n’atteignaient pas le marasme actuel, qui conduit Beyrouth sur le chemin glissant de la récession.
Cette semaine, Tripoli a rejoué l’habituelle litanie des échauffourées entre alaouites et sunnites, dont le premier bilan fait état d’au moins huit morts et soixante-quinze blessés, avant une éventuelle nouvelle flambée de violence encouragée par les deux parties syriennes.
Que Bachar se démette ou non, l’avenir du Liban s’annonce aussi incertain que celui de son puissant voisin. Plus de vingt ans après la fin de la guerre civile, avec une Syrie libanisée à ses portes, Beyrouth verrait alors le spectre de la partition communautaire lui rejaillir en pleine face…
source : causeur

Hezbollah et régime syrien : des alliés… aux intérêts divergents !
Par Wassim Nasr -
journaliste chez Atlantico
La régionalisation du conflit syrien ne fait plus aucun doute. Les prises d’otages entre chiites et sunnites à la frontière la frontière syro-libanaise se sont accentuées ces dernières semaines, profitant indéniablement au régime de Bachar el-Assad.
Des miliciens chiites du clan al-Mouqdad ont annoncé, jeudi, depuis leur QG dans la banlieue de Beyrouth, détenir une vingtaine de Syriens en représailles après la captivité d’un des leurs aux mains de la rébellion syrienne.
La configuration d’une scène libanaise évoluant dans le paradoxe d’un Hezbollah à l’apogée de sa puissance, limite la marge de manœuvre de Damas au pays du Cèdre. Néanmoins, si l’exportation du conflit servirait Damas à court terme, elle reste contreproductive pour le Parti de Dieu et pour Téhéran, ses deux seuls alliés dans la région. Mais après plus de 40 ans de manipulation et d’ingérence au Liban, le régime baasiste se laisserait-il prendre la main dans le sac ?
Michel Samaha, a-t-il vendu Bachar el-Assad ?
Michel Samaha a une histoire politique chargée et pleine de retournements. Après avoir fait partie du parti Kataëb (Les Phalanges) et après s’être réfugié en France pour fuir ses anciens frères d’armes (1985), il se transforme – avec la Pax Syriana (1990-2005) – en icône de la tutelle syrienne au Liban.
Parmi les plus virulents défenseurs de Damas et de sa politique régionale, il devient conseiller spécial du Président syrien Bachar el-Assad. Une fois député et trois fois ministre grâce à ses alliances damascènes, il a été appréhendé manu militari par une branche des Forces de Sécurité Intérieure (FSI) connue pour son allégeance aux forces de l’opposition libanaise de la Coalition du 14 Mars. Cette arrestation est inédite dans la vie politique libanaise, dans la mesure où c’est la première fois qu’un « agent » de Damas et des officiers syriens sont mis directement en cause dans une affaire sécuritaire.
Néanmoins, il est de notoriété publique que le régime syrien a commandité un grand nombre de meurtres, d’attentats et de prises d’otages, que ça soit avant, pendant ou après ses périodes d’intervention militaire (1976-1990) ou de tutelle (1990-2005) au pays du Cèdre. Ce qui laisse à penser que les aveux de Samaha s’inscrivent dans la suite logique des méfaits bassistes au Liban. (1) Mais plusieurs incohérences intriguent les familiers des méthodes des services syriens et les connaisseurs des arcanes de la vie politique libanaise.
Pourquoi le conseiller personnel d’Assad transporterait-il des explosifs dans sa propre voiture ? Pourquoi les donnerait-il au témoin clefs de cette affaire en mains propres dans le garage de son domicile personnel en lui précisant « c’est ce que veut Bachar » ? Cela alors que plusieurs groupes ou individus liés aux renseignements syriens auraient pus accomplir cette tâche sans difficulté. Le régime syrien serait-il à court d’hommes de mains pour accomplir les basses besognes ?
Une autre question se pose et c’est la plus importante : connu pour ses revirements politiques, Samaha aurait-il vendu le maître de Damas ? Cela dans la mesure où se dernier sera inquiété par la justice libanaise et peut-être internationale du moment où le commanditaire désigné, Ali Mamlouk – nouvellement nommé à la tête de l’appareil sécuritaire bassiste par Assad et prenant ses ordres directement à la Présidence – est un des deux officiers accusés dans cette affaire.
Vue sous un autre angle, cette affaire permet à toute la classe politique libanaise, y compris au pouvoir actuellement, de couper les ponts avec l’encombrant voisin baasiste. Les aveux de Samaha permettent de rompre « proprement » les liens avec l’ancien mentor d’une grande majorité des politiciens libanais. Tous compromis d’une manière ou d’une autre par leurs relations damascènes. (2) D’ailleurs les déclarations du Président de la République Michel Sleiman et du Premier Ministre Najib Mikati, vont dans le sens d’une rupture. (3) La prudence du Hezbollah dans ses commentaires et dans son interprétation de l’arrestation de Samaha est tout autant édifiante.
Ces attentats déjoués, qu’ils soient commandités par Damas ou pas, Michel Samaha a très bien pu « vendre » son maître ou « vendre » cette « sortie » au plus offrant. Il quitte le navire au prix d’une future condamnation symbolique due à sa coopération. Sans oublier que Samaha possède des informations confidentielles concernant le premier cercle d’Assad, ses hommes de confiance, ses déplacements, son mode de vie, les processus de prises de décisions, etc.
Des informations qui seront d’une grande utilité aux différents services de renseignements. Ce scénario « hollywoodien » n’est pas à exclure, quand on sait que Samaha citoyen français est l’imminence grise par excellence. Mis à part son rôle dans le rapprochement franco-syrien sous la présidence Sarkozy, il est connu pour ses relations historiques avec plusieurs services de renseignements régionaux et internationaux dont les services français ; étant donné qu’il été pour un temps l’homme de liaison entre ces derniers et leurs homologues syriens. Toutes ces questions restent en attente de réponses, des réponses qu’on pourra obtenir … ou pas.
Les prises d’otages
Depuis le début des troubles en Syrie plusieurs prises d’otages ont eu lieu des deux côtés de la frontière syro-libanaise. Malgré des informations qui évoquent leur implication directe, l’Armée Syrienne Libre (ASL) comme le Hezbollah nient. Néanmoins, les onze pèlerins chiites détenus à Azzaz sont dans une ville acquise à la rébellion depuis plusieurs mois ; alors que plusieurs sources assurent que le Hezbollah a déjà fait des incursions dans les localités frontalières de Koussair et de Zabadani pour libérer des otages Libanais.
Cela dit, le kidnapping d’Hassan Moqdad à Damas par un groupe qui se dit de l’ASL et la réaction de son clan  – qui détient depuis plus de 30 Syriens de l’ASL et un Turc –  ont marqué un nouveau tournant. Les médias du monde entier étaient mobilisés autour d’une nouvelle exception libanaise où les preneurs d’otages donnent des interviews télévisés, bloquent la route de l’aéroport et refusent de négocier avec le pouvoir central.
Mais si on examine la vidéo des aveux d’Hassan Moqdad - avouant être « un combattant du Hezbollah envoyé par Hassan Nasrallah pour combattre les sunnites et sauver le régime chiite » – on constate que plusieurs « anomalies » sont détectables : l’absence du drapeau de l’indépendance adopté par la rébellion ; le vocabulaire utilisé par Moqdad en citant Hassan Nasrallah – chef du Hezbollah – qui soit disant pousse les combattants à se battre « pour sauver le régime Chiite de Damas », alors que ce dernier est Alaouite avant d’être chiite ; les termes utilisés par les kidnappeurs en référence à Nasrallah comme « Samahat el-Saïd », donc reflétant la reconnaissance d’une stature religieuse. Cela alors que les rebelles syriens traitent les chiites et les alaouites de mécréants et Nasrallah de « suppos du diable » !
Tous ces points d’interrogations s’ajoutent au bombardement d’Azzaz par l’aviation syrienne. Pourquoi le régime syrien aurait-il décidé de bombardé cette ville si ce n’est pour tuer les otages Libanais chiites qui s’y trouvent ? Cela en connaissance de cause, la mort des onze otages ne peut qu’attiser le feu entre sunnites et chiites libanais ou du moins déclenché une vague de prises d’otages syriens. Simultanément l’appareil sécuritaire syrien pourrait être derrière la prise d’otage d’Hassan Moqdad pour les mêmes raisons. Avec ce mode opératoire le régime baasiste attire le Hezbollah dans la tourmente via sa base populaire.
L’impuissance du Hezbollah 
J’avais évoqué la question des kidnappings dans un précédent article, en expliquant que la base populaire du Parti de Dieu pourra lui échapper avant de l’entrainer dans le brasier syrien. Il est à noter que la « branche armée » des Moqdad a pu agir en toute impunité dans les zones d’influence du Hezbollah. Certains estiment que cette action n’aurait pas pu avoir lieu sans l’aval du Parti de Dieu ou même qu’elle est la réponse à l’arrestation de Samaha.
Mais même si ce clan comme d’autres clans chiites constituent l’essentiel de la base populaire du Hezbollah, les relations avec ce dernier demeurent compliquées et régies par les intérêts ponctuels des uns et des autres. Au cours des derniers mois plusieurs accrochages armés ont eu lieu entre les différents clans et le Hezbollah dans la banlieue sud de Beyrouth (fief du Hezbollah). Car même si les hommes de ces clans prêtent allégeance au Parti de Dieu ou à Amal la formation chiite concurrente, leur première allégeance demeure à leurs clans respectifs.
Dans son dernier discours du 17 aout, Hassan Nasrallah à la tête du Parti de Dieu avoue son incapacité et celle d’Amal à contrôler leur « rue ». Ce qui est dans la continuité de l’incident entre le député Hezbollah Ali Moqdad et les représentants de son clan lors de sa visite des locaux de la ligue familiale. (4) Cet incident, après l’agression d’un responsable du Hezbollah par les manifestants sur la route de l’aéroport il y a quelques semaines, démontre encore une fois la complexité des relations entre les clans et le Parti de Dieu. (5) On est loin du schéma caricatural d’une communauté chiite unie derrière un Hezbollah menant la barque comme bon lui semble.
Finalement, cette tension et l’implication directe du Hezbollah seraient indéniablement profitables au régime syrien qui y voit une manière d’élargir le conflit tout en « légitimant » le combat qu’il mène. D’un autre côté  il ne faut pas oublier que l’embrasement du Liban et la participation du Hezbollah au conflit, entamera sérieusement sa capacité de nuisance vis-à-vis d’Israël et l’empêchera de répondre aux attentes de Téhéran.
Donc paradoxalement, les intérêts de Damas et de Tel-Aviv, qui se sont déjà rejoints mainte fois au cœur du brouillard levantin, se rejoignent encore une fois vis-à-vis d’une implication directe du Hezbollah. Avec le conflit qui échappe de jour en jour aux Syriens, l’aspect régional devient le plus déterminant. Dans cette configuration et aux yeux des puissances l’intérêt des Syriens et même la guerre en cours passent de facto au second plan … mais Bachar el-Assad n’étant pas le « Bismarck du Moyen-Orient » qu’été son père, il n’est pas sûr qu’il puisse tirer son épingle de ce macabre jeu des nations.
(1) Il avoue planifier des attentats dans le nord du pays visant des personnalités libanaises comme le député sunnite du Courant du Futur Khaled el-Daher et le Patriarche Maronite Mar Bechara Boutros el-Raeï       mais aussi des membres de l’opposition syrienne actifs au nord Liban. Cela pour enflammer la scène libanaise.
(2) De sa génération seul Samir Geagea à la tête des Forces Libanaises est resté inflexible sur sa relation avec Damas, ce qui lui a valu onze années d’emprisonnement dans une cellule individuelle sans codétenus au 6ème sous-sol du Ministère de la Défense libanais (1994-2005).
(3)  Sleiman été a la tête des Forces Armées Libanaises et Mikati a été plusieurs fois député et ministre du temps de la tutelle syrienne, sachant que son frère est conseiller auprès d’Assad.
(4) Avec  l’entrée du député Ali Moqdad le représentant de la ligue familiale Maher Moqdda, annonçait « l’arrêt des opérations militaires » du clan. Interpellé le député pensant user de son autorité partisane et parlementaire, il incita à arrêter l’usage du terme « militaire ». Mais cela eu plutôt un impact négatif dans la salle et les Moqdad insisteront sur l’usage du terme en question.
(5) Le Hezbollah, obligé de garder des bonnes relations avec sa base populaire, ferme l’œil sur les différents trafics entrepris par ces clans, que ça soit en termes de trafics d’armes, de drogues, de braquages ou d’autres formes de criminalités qui gangrènent ces zones d’influences.

Tripoli, ville du nord du Liban en plein chaos
Un cheikh sunnite tué dans de violents combats à Tripoli au Liban
Un jeune cheikh sunnite a été tué vendredi dans de nouveaux combats liés au conflit syrien entre deux quartiers rivaux de Tripoli, la grande ville du nord du Liban.
Le cheikh de 28 ans, Khaled el-Baradei, a été tué dans ces affrontements violents qui ont éclaté à l’aube après un fragile cessez-le-feu, entre le quartier alaouite de Jabal Mohsen et celui sunnite de Qobbé.
Les combats à l’arme automatique et au lance-roquettes ont provoqué d’importants incendies dans ces quartiers, situés dans l’est de la grande ville portuaire, a rapporté le correspondant.
Au total, les combats, entamés lundi, ont fait au moins 11 morts et 86 blessés en quatre jours, entre des hommes armés de Jabal Mohsen, partisans du régime syrien contrôlé par le clan alaouite du président Bachar al-Assad, et leurs rivaux à Bab el-Tebbaneh, quartier sunnite proche de celui de Qobbé et hostile au pouvoir à Damas.
Il s’agit du dernier épisode d’une série de combats qui secouent régulièrement Tripoli depuis le début de la crise en Syrie il y a 17 mois.
Le Liban, qui a connu 30 ans d’hégémonie syrienne, reste profondément divisé entre adversaires et partisans du régime Assad dont le puissant mouvement chiite du Hezbollah.
Le Premier ministre libanais Najib Mikati s’est dit « inquiet des tentatives d’entraîner le Liban de plus en plus dans le conflit en Syrie.
La France a mis en garde contre toute importation du conflit syrien sur le territoire libanais, alors que le département d’Etat américain s’est dit « très inquiet des violences » au Liban et d’une « réaction en chaîne à partir de la Syrie ».
L’ONU a appelé la communauté internationale à soutenir davantage le Liban face aux risques de déstabilisation liés aux retombées du conflit syrien.
source : lorientlejour
Sélection Aschkel pour israel-flash
http://www.israel-flash.com/2012/08/proche-orient-regionalisation-du-conflit-syrien-le-liban-au-bord-de-limplosion/#axzz24X2cyDWa 

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