mercredi 29 août 2012

Le dernier des derniers..Par Somelier Richard



Le dernier des derniers..Par Somelier Richard

Le café vert perdait peu à peu sa jeunesse et vieillesse juive. 
J’ai été témoin de son dernier été lorsqu’il fut vendu au nouveau proprio qui en a fait un resto réputé. Très réputé. Dans les années 85. Il était encore à ses débuts. 

Bien avant, on pouvait compter bien plus de 100 tables et bien plus de 300 chaises toutes occupées par nos familles juives. Puis les vieux et les vieilles ont squatté par groupe par affinité son coté gauche, laissant une bonne partie du droit aux jeunes. Tunisois et Goulettois unis dans un même espace qui ne désemplissait pas le soir jusqu’à 22 heures. Avant que ceux l là ne se préparent pour les dancings du nord à SIDI BOU. 

Les parents étaient pour la plupart fiers de voir leurs enfants côtoyer d’autres enfants aussi beaux que les leurs et je ne parle pas des jeunes filles habillées à la mode. Ces visages d’anges marqués par le rire et le sourire.

Puis, tout le monde est parti et les tables ne furent plus qu’un dizaine pour la plupart esseulées.

J’étais souvent seul à prendre mon petit café mais sans jasmin puisque le jasminier lui aussi a disparu avec nos juifs. Je regardais surtout les moustiques qui tournoyaient sous les lumières des lampadaires jusqu’à se brûler les ailes et les lézards qui ne craignaient plus personne, musarder tout prés de ma tête. 

Je me disais au fond de moi sont t’ils devenus si fous que cela pour aller ailleurs… ? Mais où peut-on aller après avoir vécu de si beaux moments… ? Où est donc ce pays qui ressemble au notre, au mien.. ! J’avais l’impression d’entendre des échos venus d’ailleurs, des voix juives facilement reconnaissables à leur timbre tellement j’étais imprégné par elles.

Ces voix, ces timbres, que le silence a englouti comme un paquebot qui sombre corps voix et âmes. 
Dans ces moments là, je croisais les jambes, je tirais une cigarette et je rejetais la fumée que je voyais monter au ciel alors qu’autrefois elle était unie avec celles de mes amis. Comme un grand cordon sombre qui n’en finissait pas. 

Ma fumée montait en solitaire sans être accompagnée vers ces étoiles qui avaient perdu leur éclat. 
Solitaire je l’étais comme elle, attablé à un café qui avait perdu son âme. 

Et puis un jour, il a fermé le café vert pour travaux. Lui qui n’a jamais fermé depuis son existence pas même pour un lifting. Lui qui était souvent habillé de joie de rires le voilà fermé. Une grande porte s’est fermé une autre moins conviviale s’est ouverte. Mais il n’y a plus photos.

Lorsqu’un juif s’en va, il emporte tout avec lui laissant derrière lui beaucoup de tristesse. 

Je n’y suis plus retourné pour croiser mes jambes et encore moins fumer une clope et ma fumée s’en est morte avec lui en 1989.

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